jeudi 15 juin 2023

4

 Saint Rivoal, petit matin d'hiver. Froid humide dans le vallon, le soleil uniquement sur les crêtes boisées. la terre fume de la fraîcheur. Pas un bruit avant l'arrivée de deux jeunes elfes, grandes crinières rousses descendant sur leurs épaules emmitouflées. L'école n'est pas encore ouverte. En attendant, elles pépient en marchant dans le froid, sur la place.

Les morts du cimetière frissonnent  en-dessous des raies de lumière. La rivière de Rivoal glougloute en contrebas, invisible dans les frondaisons. 

Sur le chemin, les rus chantonnent en cadence dans les frimas de l'hiver. Une buse énorme prend la pose dans un champs. Le soleil se faufile entre les troncs, prend de la vigueur en se hissant par-delà les crêtes. Un silence épais règne sur la route de Bodenna.


Janvier 2023

10

 Il faisait beau temps sur Sein. Comme il peut en être. Un souffle de vent refroidit ou réchauffe, selon l'endroit, le degré de protection optimisé, ou pas. 

Un grain est toujours possible. Et presque rien ne permet de s'en extraire. Il faut le savoir.

9

 Le soleil tape fort sur Men Brial quand le vent peine à se frayer un chemin entre les lacis emmélés. L'insularité? oublié un instant.

La précarité océanique? Occultée un instant.

Il suffit pourtant d'un grain, d'une cavalcade anthracite qui surgit de la Chaussée, sans prévenir, comme ça, sur le pouce. Petit rappel, si besoin, que la vie en son Sein est particulière. Contre vents et marées, au jour le jour.

La chaleur peut être douce sur Men Brial, auprès du rempart des maisons à touche-touche. Il fait bon s'assoir sur la digue, verres posés sur son large plateau. Les postures nonchalantes de l'été. Des enfants s'ébrouent sur la plage en contrebas ou dans l'eau fraîche de l'anse.

Néanmoins, toujours un coup d’œil au-dessus. Au cas où.

8

Kéréon, Nividic, la Jument.

Les fûts triomphants de la verticalité arrogante

Prophètes de la surveillance maritime

Ils flottent sur l'eau

Aériens, mormoréens

Sur l'échiquier, pièces maîtresses confondues

Découpés dans les bleus

La césure virgule de l'horizon sempiternel

Dans la lumière éclatante du jour

Ils dorment

Dans leur raideur alanguie.

7

 La mer gronde par touches saccadées dans un contrebas essoufflé qui se pose en Enfer déchiqueté, broyé. Les gémissements sourds de la roche fatiguée le laissent totalement stoïque. Il est là, campé, immuable, debout sur son léger promontoire. Il jaillit dans le ciel, à sa démesure, sa peinture gwen ha du en bandes organisées. Il oppose son indifférence hermétique et polie au spectacle de la nature furieuse qui s'est jouée, se joue et se jouera encore à son dévers. Il est une vigie terrestre. Les contingences...

6

 De la dentelle pour les poètes

De la bouillie de rochers pour les pessimistes

Le vent, la mer, hachoirs furieux

Rarement rassasiés.

L'herbe jaunie, harassée par la brulure de l'été

La pierre, sèche comme une vieille peau rêche

Lisse comme patinée à l'extrême.

Tout est creusé, dentelé, usé jusqu'à la corde

Paysage aux blessures millénaires

Qui se mue en carte postale

A la faveur de l'été triomphant

Et d'une subreptice absence d'Éole.


4

 Le bateau de la BF est rentré dans Kéréon.

 Dans le silence, ce moment fugitif

Kéréon est resté debout, intact

Et le bateau a filé sa route, plein ouest.

Syndrome post 9/11.

5

 Molène dans la brume

Dans la bruine

Janus reveillé

Insularité définitive

Plus rien autour

Les rochers, les îles, 

Disparus 

Ouessant inconnue

Continent évaporé

L'expérience de la solitude mouillée

Par moment

Un voile de clarté

Les îles, les rochers

Réapparus 

Comme des fantômes irréels,

Des bateaux immobiles

Qui fendent la brume

Indifférents à la bruine.



4

 Kadoran bout du monde, herbe rase, rochers nus, évidés

Eaux turquoises

A peine des relents d'écume sur la ligne de flottaison

Grandeur du paysage 

Dans l'épuisement des éléments agissants 

Échancrures voraces

Taillées dans l'incertitude des vents tournants

Immobilité minérale de façade

Creuser dans la rudesse

Les hurlements de la terre bastonnée

Les moines expient leur résistance.


3

 Il ne fut longtemps qu'une photo, découpée, collée dans un cahier Conquérant. Un geste figé, frappe d'un corner, rutilant maillot vert sur les épaules. Pelé était un joueur en fin de carrière au Cosmos de New York.

 

Il n'existait pas dans les matches solitaires, dans le jardin. Il n'était pas celui qui marquait entre les deux poteaux de bois, vert Cosmos. Il n'était qu'une image dans un cahier. Platini, Rocheteau, Rummenigge, Amoros, Rossi, Zico et le jeune Maradona. Eux marquaient entre les poteaux vert Cosmos.

Il était le cousin lointain du football. Oh! On savait qu'il était Grand mais il ne jouait plus. Une photo presque jaunie, couleur Brazil 70. Pas de place pour lui dans les jeux, les matches inventés et les buteurs opportuns.

 

Seul l'oncle J., plus vieux, déjà vieux, n'en démordait pas. Pas de débat entre Pelé "l'artiste" et Maradona "le drogué". Le capitalisme avait dévoré le football et le Pibe avec. Pelé était resté pur. 

1958 - 1970? des momentums indépassables du "bon vieux temps", avant l'argent qui pourrit tout. Les temps d'une jeunesse en noir et blanc suivie d'une maturité triomphante, cadenassée dans un romantisme de pacotille. Joga bonito au son des vinyles de Jorge Ben.

Bah! Ça donnait l'occasion d'une discussion enflammée et de faire tourner les verres de Chartreuse. Vert Cosmos, si on n'y ajoutait pas de glaçon.


Puis, la télévision, aidée par internet plus récemment, a permis  d'inscrire Pelé dans l'histoire du monde. Le triplé de 1958 en demi-finale contre la France de Kopa et Fontaine, le réflexe de Banks, le grand pont sans ballon, les buts de Brésil-Italie 70. Une mythologie parcimonieuse. Des bribes. Des éclairs fugaces. L'intemporalité érigée en dogme. Pelé, comme Ali : The Greatest.


Le cahier est perdu, le Cosmos n'existe plus vraiment et Pelé est mort hier (29/12/2022).

LE moment ...est passé.

7

Qui ment le plus?

L'amant?

Agressif "mari" jaloux

La Mante?

Empêtrée dans sa double vie

Les ressorts sont rouillés, fragmentés

Selon le prisme et les humeurs

Les nuits hachées, ratiboisées

La fatigue est une colère sourde

Muette dans le quotidien

Logorrhée parcimonieuse et médicale 

De circonstance

Le bruit s'éloigne au gré des résiliences imparfaites

Le temps est un pansement

Qui se décolle 

Vite

Quand le passé simple surgit en averses brutales

La chair, à l'agonie gémissante

Se repaît de l'abandon

De l'adieu aux frissons

Les baisers mécaniques, lambeaux d'affection

Comme des parades nuptiales

Apprises

Au gré des ans.

Le deuil impossible

Caveau ouvert

La peur du vide

D'air

Et les vertiges d'une autre vie

Percutant l'errance de la précédente.

Le pardon est un exercice aléatoire


Le pardon est un exercice aléatoire.



10

 

 

 

                                                Croix de bois, Croix de fer dit l’adolescente en soupirant 

                                                Marcher ici est un enfer

                                                Trois marmottes ont crié en même temps.


Col de la croix de fer, 2067 m

9

 

 

 

                                                         Sur des pentes perclues de fatigue 

                                                         Deux chevaux paisibles tondent l'herbe au millimètre

                                                         D'où vient donc cet Eire des Chieftains?


Col du Glandon, 1924 m

8

 

 

 

                                                       L'orchestre philharmonique des cloches

                                                       Entame ses fureurs métalliques

                                                       Mâtines lancinantes et tardives.


Col de la Madeleine, 2000 m

7

 

 

                                                       Dans l'herbe rase souffletée

                                                       Les signes vers l'Altus

                                                       Le petit matin des eaux turquoises.


Cormet de Roselend, 1968 m

4

 Assis sur le Rocher, Romantique en sursis La mer au bout des pieds,  J'assiste au lever de la pleine lune. Énorme boule,  Jaune orangé ...